Le Cercle Modernist

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Jimmy Smith : Monsieur Hammond.

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- Jimmy Smith en 1967 (Source : VR) -

 

 

"Jimmy Smith est la huitième merveille du Monde" - Miles Davis 1962.

 

 

"The Cat" un morceau qui évoque à tout Modernist le plaisir de danser, et la quintessence de notre culture.

Jimmy Smith fait incontestablement partie des musiciens vénérés par l'ensemble des générations Modernist,

le son de cet incroyable et génial organiste reste indissociable de l'atmosphère si particulière des authentiques Mod'Clubs.

Jimmy Smith va renouveler la musique Jazz, tout en attirant un plus large public grâce à sa maitrise de l'orgue Hammond B-3.

Ce grand musicien va littéralement changer l'image de l'orgue, en inventant de nouvelles sonorités avec un style de jeu unique.

 •

Incontestablement, l'importance de l'orgue (de marque Hammond !) dans la carrière de ce grand musicien est totalement primordiale.

 

 - Référence musicale I (en bas d'article) -

 

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 - Jimmy Smith circa 1959 (Source : JM) -

 

Pour mieux comprendre la carrière de cet artiste hors du commun, il faut tout d'abord se pencher sur l'orgue Hammond.

 •

En effet, comme nous allons le voir, Jimmy Smith va choisir lui-même l'orgue Hammond B-3 en 1955.

 •

Pour bien maîtriser son nouvel instrument, Smith va d'abord scrupuleusement s'appliquer, durant une année pleine,

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à jouer de son orgue, son nouvel instrument de prédilection, et l'utiliser le plus vite possible.

 •

Tout d'abord, et étrangement, soulignons que l'inventeur de l'orgue Hammond, monsieur Laurens Hammond,

n'était aucunement musicien... mieux même : il ne connaissait strictement rien au domaine musical !...

 

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Malgré cette caractéristique réellement étonnante pour un inventeur d'instrument de musique,

Laurens Hammond va rapidement s'intéresser aux mécanismes des orgues (qui lui rappellent son travail d'horloger).

 •

 Laurens Hammond est dès son plus jeune âge un véritable passionné, et surdoué (!), de mécanique.

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Le jeune homme n'hésite pas à proposer, dès ses 14 ans (!!), le plan d'un embrayage automatique d'automobile à

Louis Renault !

• 

Plus tard, Laurens Hammond devint un commerçant prospère à la tête de sa propre compagnie, la Hammond Clock Company.

Une entreprise d'abord spécialisée dans la fabrication de lunettes, et de mécanismes destinés aux montres.

 

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- Laurens Hammond à la fin des années 1930 (Source ; MC) -

 

Dès le début des années 1930, Laurens Hammond s'investit dans des recherches sur les modèles d'orgues.

Il va réussir, après de très nombreux essais, à mettre au point un tout nouveau mécanisme destiné au système d'action des claviers.

Le système d'action des claviers est un mécanisme primordial pour l'orgue : il permet d'avoir des sonorités variées.

Laurens Hammond va donc utiliser ce nouveau clavier comme un contrôleur principal qui va donner une nouvelle impulsion à l'instrument.

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De ce fait, l'inventeur permet à l'orgue de produire de toutes nouvelles et surprenantes sonorités encore inconnues.

Grâce à l'indéniable expérience de fabrication dans les technologies de précisions (montres, lunettes...) de la Hammond Clock Company,

la qualité de ce nouveau générateur à roues phoniques est véritablement excellente (certains de ces orgues sont encore en fonction de nos jours...).

Son projet obtient avec facilité le brevet en 1934, mais même si le nouveau procédé de monsieur Hammond est réellement efficace, il n'a pas d'argent.

 

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La situation de crise économique propre à cette période (la Grande Crise provoquée par le Krach Boursier de 1929)

 induit les autorités à accepter tous les projets (comme par exemple la production d'orgues...) susceptibles d'apporter des emplois.

Mais, pour arriver à atteindre réellement son objectif Laurens Hammond va devoir trouver de l'aide et un apport financier conséquent.

Comme je l'ai souligné, Laurens Hammond est ruiné car sa société n'a pas résisté aux nombreux essais des modèles.

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Pour la petite histoire, c'est un riche mélomane passionné par les orgues, l'industriel de l'automobile Henry Ford (!), qui va financer les premiers orgues Hammond.

Le premier ancêtre de l'orgue Hammond B-3 (appelé modèle A) est donc produit dans les ateliers automobiles de Henry Ford, en 1935.

Quelques modèles d'orgues Hammond vont précéder le fameux B-3, ce qui va permettre d'améliorer peu à peu ses performances.

Comme avec le B2 (qui sort en 1949) un modèle d'orgue possédant la particularité d'introduire un son vibrato "séparé", grâce aux fameux claviers,

 

 

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 - Encart publicitaire HAMMOND en 1963 (Source : TM) -

 

 

Le B2 innove aussi avec de nouvelles fonctions permettant de régler le volume sur l'ensemble de l'instrument.

Notons que lors de la sortie du tout premier modèle de l'orgue B-3 les avis sont divergents et partagés,

certains vont même attaquer la compagnie de Laurens en justice, et malgré la perte de ce procès Hammond va garder le droit d'exploiter le brevet du B-3.

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Lors de sa sortie en 1955, le B-3 coûte 2410 Dollars U.S, l'appareil doit se brancher à un ampli, puis le reste à une prise électrique.

Notons, au passage, que l'orgue B-3 va bénéficier d'innombrables essais effectués... dans le cadre de liturgies pour les églises !...

De plus, avant même la sortie du modèle B-3, les orgues Hammond vont être largement utilisés par les orchestres de musique de l'U.S. Army.

 

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Tout comme avec la musique Jazz (reportez-vous à l'un des derniers articles du Cercle Modernist "U.S. Army Bands : Traditions et Héritages"),

les nombreuses bases de l'Armée américaine vont largement favoriser la diffusion des orgues de marques Hammond.

Plus tard, au tout début des années 1960, ce sont les disques du Lou Bennett Quartet, RCA Records, qui vont populariser l'orgue Hammond en France.

C'est donc cet orgue Hammond B-3, avec son nouveau système de percussion et de tirettes linéaires, que Jimmy Smith choisit dès sa sortie.

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Jimmy Smith fait clairement partie de cette grande et fantastique famille d'organistes de génie de la grande musique Afro-Américaine.

Dès les années 1930, des musiciens comme Fats Waller, ou l'immense Count Basie, utilisent déjà les nombreuses qualités de cet instrument à vent : l'orgue.

La liste est incroyablement longue pour désigner les nombreux autres virtuoses : Wild Bill Davis, Brother Jack McDuff, Lonnie Smith, Jimmy Mc Griff, Bill Doggett...

Tous des artistes de grand talent qui vont tous enrichir l'orgue de nouveaux sons et rythmes, Ray Charles en fait d'ailleurs largement partie !   

 

 - Référence II (en bas d'article) -

 

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 - Publicité HAMMOND dédut 1960 en Angleterre (Source :VOEA) -

 

 

Jimmy Smith, né James Oscar Smith Jr, voit le jour le 8 décembre 1928 dans la petite ville de Norristown en Pensylvanie.

Notez que cette date de naissance (1928) est sûrement plus probable que 1925, date malheureusement le plus souvent citée.

Comme je le souligne très souvent, ce problème de date de naissance est récurrent pour les artistes Afro-Américains.

Des artistes Noirs qui ont souffert d'une impitoyable et scandaleuse ségrégation raciale matérialisée, entre autres, 

par une évidente et volontaire "mauvaise gestion" des populations civiles (absence de registre d'état civil, d'acte de naissances...).

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Très tôt, le tout jeune James Oscar Smith Jr est initié à la musique par son père, un pianiste professionnel.

Bien entendu, c'est au piano qu'il a son premier contact avec la musique, sous le joug de son père. 

Dès son sixième anniversaire, il rejoint son père pour effectuer quelques tournées avec lui.

Il commence sa jeune carrière en devenant rapidement une "petite vedette" grâce a son évidente facilité de jeu.

Il remporte le concours de jeune talent organisé par une radio de Philadelphie à tout juste 9 ans !...

 

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 Le jeune Jimmy Smith va poursuivre son apprentissage musical auprès de son père, tout en se produisant pour d'autres formations.

Cette heureuse et trépidante vie de musicien va devoir être oubliée, pour un temps, car Jimmy Smith va devoir incorporer l'U.S. Army.

Lorsqu'il est démobilisé, fin 1947, Jimmy décide de se perfectionner et d'apprendre plus "sérieusement" la musique.

Jimmy Smith s'inscrit d'abord à l'école de musique du College Royal d'Hamilton, avant de rejoindre la Léo Ornstein School en 1949.

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C'est durant cette période qu'il fait la connaissance de Don Gardner, un musicien batteur, compositeur/chanteur de talent.

Don Gardner, qui a mis sur pied sa formation The Sonotones depuis 1953, va enregistrer pour Bruce, puis Junior Records (en 1954).

Plus tard, Dan Gardner & The Sonotones vont engager la superbe chanteuse Dee Dee Ford (photo ci-dessous) pour les rejoindre en 1960.

Jimmy Smith va donc rester, et jouer du piano, ou de l'orgue, de 1951 à 1954 auprès de Don Gardner et de sa formation.

 

 

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- Dee Dee Ford (qui va rejoindre les Sonotones en 1960) et Don Gardner (Source : SB) -

 

 

C'est donc durant cette même période que Jimmy Smith décide d'acquérir et d'utiliser le tout nouvel orgue de la marque Hammond le B-3

C'est lors d'un concert de Wild Bill Davis, organiste précurseur de génie, que le jeune Jimmy tombe littéralement sous le charme de l'orgue.

Jimmy Smith décide d'acheter rapidement un orgue moderne et performant, il va économiser avec peine pour l'acquérir.

Surtout, le jeune Jimmy ne va pas oublier les précieux conseils de Wild Bill Davis : assiduité et toujours le travail, pour l'apprentissage de l'orgue.

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Dès l'achat de son orgue, un Hammond B-3, Jimmy passe ses journées à répéter inlassablement pour parfaitement maîtriser son nouvel instrument.

Notez, pour la petite histoire, que le tout premier orgue Hammond de Jimmy Smith est loué, il n'a pas encore l'argent pour l'acheter...

Tout en continuant avec assiduité cet apprentissage de l'orgue, Jimmy commence également à jouer dans divers clubs, comme le fameux Small Paradise à New York City.

C'est durant ses premières années que Jimmy Smith met au point cette manière si particulière de jouer de l'orgue, un jeu qu'il va d'ailleurs sans cesse améliorer.

Dès le départ, il s'inspire clairement du jeu Bill Doggett, tout en cherchant à développer des techniques alternatives : comme des improvisations avec sa main droite...

 

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Jimmy Smith n'a pas encore trente ans, mais il est déjà reconnu comme un grand organiste de génie par ses propres pairs.

La spécificité de son style est très vite remarqué : il donne une nouvelle amplitude à son jeu grâce à son incomparable habilité.

Ses longues et harassantes séances pour s'améliorer vont aussi lui permettre d'avoir cette "élasticité" de jeu légendaire.

Jimmy Smith devient rapidement un personnage important sur la scène musicale, et plus spécifiquement à Philadelphie.

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Cette grande ville du Nord-Est des Etats-Unis va développer un style musical spécifique combinant le BeBop'Jazz avec le Blues.

Une spécificité musicale qui se retrouve justement dans le jeu puissant, nerveux et sautillant de l'orgue du virtuose Jimmy Smith.

Néanmoins, notons que le jeu de Jimmy Smith est encore marqué, durant ses années 1955/56, par le swing de Wild Bill Evans.

De plus, soulignons que les années 1956 et 1957 sont clairement des années charnières dans la carrière du musicien de Jazz.

 

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- Wild Bill Davis en 1954 (Source : JM) -

 

Tout d'abord, l'année 1956 est marquée par une rencontre primordiale (pour sa carrière) avec Alfred Lion créateur et propriétaire du label Blue Note.

De plus, l'année suivante en 1957, Jimmy Smith participe à un festival de tout premier ordre (et joue avec brio !) en Europe continentale;

Ce dernier événement va indiscutablement accélérer sa jeune carrière de musicien en solo, qui en était justement à ses prémices.

Lors de ce festival de tout premier ordre en 1957, le Newport Jazz Festival, le talent de l'organiste va effectivement se révéler au grand public.

Une année auparavant, Jimmy Smith est donc approché par monsieur Alfred Lion, co-créateur (en 1939), et président, du label de Jazz Blue Note Records.

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Le président de Blue Note Records ne veut pas "manquer" ce jeune virtuose de l'orgue : il le fait rapidement signer pour son label en 1957.

Soulignons que dès ses premiers enregistrements pour Blue Note Records, Jimmy est présenté comme un musicien novateur et doué :

Sur les pochettes des tout premiers disques vinyles sortis pour l'organiste, son nom est agrémenté de termes flatteurs "The incredible Jimmy...", "A New Star... New Sound".

En fait, cette rencontre n'est pas fortuite : l'organiste virtuose est arrivé littéralement à "maturité" grâce à un parcours lentement et remarquablement constitué.

N'oublions pas ses longues années d'apprentissage (auprès de son père, et en solo), son retour dans les écoles de musique pour parfaire sa culture musicale;

 

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puis, sa première rencontre importante avec le grand Wild Bill Davis (!!)... en bref,  Jimmy Smith maîtrise avec génie son orgue.

Lors de ce festival de Newport en 1957, la formation de Jimmy Smith fait une apparition particulièrement remarquée, lors des concerts joués en matinées.

Lors de ce festival de Newport en 1957, la formation de Jimmy Smith, intitulée The Jimmy Smith Trio", est composée de talentueux musiciens.

Effectivement, The Jimmy Smith Trio a dans ses rangs le grand guitariste Ed Mc Fadden, accompagné par le génial Donald Bailey à la batterie.

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Dès sa signature pour le prestigieux label Blue Note Records, contrat "poussé" par Alfred Lion qui ne veut pas voir une future vedette échapper à son label,

Jimmy Smith va enregistrer son tout premier single en 1957 ("Midnight Sun" / "The Preacher" - Blue Note (45-1636) pour le label originaire de New York City.

Cette année 1957 est particulièrement prolifique en enregistrements pour Jimmy Smith avec 5 singles enregistrés pour Blue Note Records.

De plus, comme souligné auparavant, l'organiste est présenté dès son tout premier single (45-1636) avec l'intitulé ; "New Sounds on the Organ"

 

- Référence musicale III (en bas d'article) -

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- L'illustre et fameux logo de la compagnie Blue Note Records (Source : BNR) -

 

 

Jimmy Smith va d'ailleurs maintenir cet important rythme d'enregistrement pour sa nouvelle compagnie Blue Note Records.

Effectivement, l'année suivante, en 1958, le talentueux musicien sort quatre autres singles (dont le magnifique "After Hours").

Soulignons que la moitié de ces morceaux va être enregistrée durant les fameuses sessions du Small Paradise Club, sur la 7éme Avenue à New York City.


Notons que Jimmy Smith va très rapidement acquérir une renommée d'envergure internationale auprès d'un large public.

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Tout en étant sous "les feux de la rampe" (en grande partie grâce à sa remarquable prestation au festival de Newport en 1957)

Jimmy Smith va clairement bénéficier de toute la puissance financière, commerciale et publicitaire de Blue Note Records.

Soulignons, au passage, l'importance et le rôle primordial de Blue Note Records dans la diffusion et l'enregistrement du Hard Bop.

 Le Hard Bop, ce nouveau courant musical émergeant au sein Jazz Afro-Américain, en réaction au cool Jazz considéré comme trop académique.

 

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- Jimmy Smith prés du "Baby Grand Club" circa 1955 (Source : JM) -
  

Tout en étant indéniablement un véritable moteur pour le Hard Bop Jazz, Blue Note Records va aussi jouer un rôle considérable dans la carrière de Jimmy Smith.

L'organiste va rester fidèle de longues années au label de New York City, nous pouvons même dire qu'il va y rester fidèle tout le long de sa carrière.


Effectivement, à partir de 1957, avec son tout premier single (Blue Note 45-1636), Jimmy Smith va enregistrer très régulièrement pour Blue Note Records.

Jimmy va néanmoins enregistrer beaucoup plus sporadiquement à partir de 1966, en se consacrant à sa nouvelle compagnie de disques, Verve Records.

Le dernier single enregistré chez Blue Note Records (45-1909) par Jimmy Smith sort en 1977, avec le superbe morceau "Prayer Meetin' Part 1 & 2". 

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Les très nombreux morceaux enregistrés par Jimmy Smith chez Blue Note vont avoir un succès retentissant auprès du public, d'innombrables titres vont devenir des classiques.

Nous l'avons bien vu auparavant : Jimmy Smith est présenté dés ses premiers pas comme un nouveau prodige et génie du Jazz, par Alfred Lion et Blue Note


Il est vrai que le jeu de l'organiste est totalement novateur et génial : il utilise avec maestria et brio ses doigts et ses pieds pour distiller de nouvelles et géniales sonorités.

Jimmy Smith a bien retenu la leçon auprès de ses maîtres, Davis et Milt Buckner, en mélangeant avec génie le son joué par les orgues dans les Eglises avec celui du Jazz.

 

 - Référence musicale IV (en bas d'article) -

 

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- Jimmy Smith en 1966  (Source : JM/RF) -

 

La liste des enregistrements de Jimmy Smith pour les studios d'enregistrements du label Blue Note est tout simplement incroyable !

Nous parlons effectivement de plusieurs dizaines d'albums, sans oublier plus d'une trentaine de singles (!) : une oeuvre véritablement monumentale.

Un fabuleux ensemble de morceaux de Jimmy Smith qui vont marquer et influencer toute l'histoire de la musique contemporaine.

A vrai dire, la liste des morceaux serait trop longue à énumérer, sans compter les innombrables collaborations de l'organiste durant cette période Blue Note.

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Lors de ses différentes collaborations Jimmy Smith va enregistrer avec Lou Donaldson dès 1957 (face B/"Summertime"  Blue Note 45-1667).


Cette toute première collaboration, en duo, pour Jimmy Smith n'est pas un hasard : Alfred Lion, homme d'affaires et cofondateur de Blue Note Records, est aux commandes.

Alfred Lion tenait absolument à associer son tout nouveau poulain, l'Incredible Jimmy Smith, avec sa toute nouvelle recrue le saxophoniste Lou Donaldson.

Lou va effectivement enregistrer une première fois pour Jimmy, et quelques mois plus tard (1957) il enregistre en solo son premier single (Blue Note 45-1680).

 

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Je ne vais pas aller plus loin à propos de Lou Donaldson, son extraordinaire carrière de saxophoniste est largement abordée dans ce "Jazz au Clair" du "Cercle Modernist".

Jimmy Smith va naturellement enregistrer avec une autre grande vedette du label Blue Note : le talentueux et légendaire guitariste Kenny Burrell.

Etrangement cette collaboration ne va pas se faire directement auprès de Blue Note, les deux Jazzmen vont en fait enregistrer pour Verve Records.

Plus exactement c'est en 1963 qu'ils sortent ensemble le morceau "What'd' I Say" (Verve Records VK10299), face B de "Theme From "AnyNumber Can Win".

En fait, Jimmy Smith a signé un contrat, dès 1962, avec la maison de disques de Norman Granz Verve Records (tout en restant auprès de Blue Note).

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Verve Records est une maison de disques spécialisée dans le Jazz, une entreprise subsidiaire de la grande compagnie Interscope Geffen A&M Records.

Le fondateur de Verve Records, Norman Granz, va d'abord mettre sur pieds cette maison de disques pour distribuer les disques d'Ella Fitzgerald.


Les quatre premiers disques enregistrés par Verve Records seront d'ailleurs exclusivement dédiés à Ella Fitzgerald durant l'année 1956.

Le tout premier enregistrement ("Walk'on The Wild Side Part 1&2") de Jimmy Smith pour Verve Records (VK 1062) est fait en avril 1962.

Avec Verve Records, Jimmy Smith commence une nouvelle et longue histoire avec un autre grand et mythique label du Jazz Afro-Américain. 

 

 - Référence musicale V (en bas d'article) -

 

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 - Affiche promotionnelle Verve Records (Source : JM) -

 

 

Avant de poursuivre cette nouvelle étape de la carrière de Jimmy avec Verve Recordsarrêtons-nous encore un instant sur sa "période bleue".

Une période d'enregistrements au rythme frénétique : en 1963, par exemple, Jimmy Smith enregistre 4 Lp pour la compagnie d'Alfred Lion.

Comme je l'ai souligné auparavant, ses premiers enregistrements rencontrent très rapidement un important succès auprès du public.

L'élogieuse présentation faite par Blue Note Records ("Jimmy Smith : New Sound On The Organ") lors de la sortie de son premier single,

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 ("Midnight Sun"/"The Preacher"Blue Note 45-1636), permet incontestablement à l'organiste de "sortir du lot" dès le départ.

En outre, Jimmy Smith possède un fort charisme : c'est un véritable gentleman, toujours souriant et tiré à quatre épingles.

Cette nature particulièrement agréable, qui colle parfaitement au Cool insufflé par son Jazz, est peut-être due à une alimentation bien soignée.

De nombreuses anecdotes attestent effectivement d'une grande passion du musicien pour la gastronomie, et plus précisément la Soul Food.

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Lors de ses nombreux passages à Paris au Mériden Jazz Club, durant la fin des années 1980, Jimmy Smith n'hésitait pas à découvrir notre fabuleuse

gastronomie dans les meilleurs restaurants de la capitale : l'organiste avait besoin de forces pour ses impressionnantes prestations. 

 •

Pour conclure cette petite "évocation gastronomique" : une des premières compagnes de Jimmy Smith va déclarer, lors d'un entretien avec des journalistes,

" le tout premier amour de Jimmy est le Jazz, suivit par elle-même, puis par les films Western,... et en quatrième : la gastronomie !..."

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Tout en étant un organiste d'exception et de génie, Jimmy Smith était également un véritable showman de grand talent.

Le musicien était littéralement en transe et en totale communion avec son orgue, lors de ses innombrables concerts.

Lorsqu'il décide de signer également pour Verve Records en 1962, Jimmy Smith est déjà une grande vedette internationale.

En plus du tout premier single, dont nous avons parlé auparavant, Jimmy sort deux autres 45Tours lors de son arrivée chez Verve Records en 1962.

 

- Référence musicale VI (en bas d'article) -

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- "Hobo Flats" en 1963 (Source : 75 M.N.S) -

 

 

Notons que l'organiste va garder durant son passage chez Norman Granz, le puissant propriétaire de Verve Records, le même rythme élevé d'enregistrements.


Même si Jimmy Smith arrive chez Verve Records avec une stature de vedette établie, il va augmenter considérablement sa renommée grâce à son nouveau label.

La puissance financière et l'implantation commerciale du label de Norman Granz vont effectivement lui permettre d'atteindre une stature internationale.

Cette nouvelle période chez Verve Records marque pareillement certaines préférences musicales au sein même de notre scène Modernist.

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Des préférences musicales Modernist spécifiques qui peuvent justement se déclarer pour les morceaux distribués par Verve Records ;

 comme avec les désormais classiques "The Cat" ou "Got My MojO Workin", morceaux qui vont faire les beaux jours (véritable Scene Maker...)

des grands rassemblements et soirées Mods durant toutes les années 1980 en Angleterre, puis en Europe continentale.

Le son de l'orgue Hammond B-3 de l'Incredible Jimmy Smith poussait littéralement toute l'élégante assemblée à se diriger vers le DanceFloor !...

 

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De la même façon, les concerts de Jimmy Smith à Paris était un moment incontournable pour toute la Smart'Crowd Parisienne.

Il est vrai que Jimmy Smith va développer toute sa science du jeu lors des séances dans les studios d'enregistrements de Verve Records.

Lors de ces années 1962/1970 (les plus prolifiques de sa carrière) Jimmy Smith va alterner les enregistrements entre Blue Note et Verve Records.

En 1964 par exemple, Jimmy Smith sort 7 singles : 3 (dont "The cat" avec Lalo Schifrin) sont enregistrés pour la compagnie de Norman Granz, les autres pour Alfred Lion.

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Durant cette période, Jimmy Smith consacre rarement exclusivement son temps à une seule compagnie de disques, en fait cela n'arrive que deux fois;

 

plus exactement en 1965, puis en 1967, et toujours pour la compagnie de Nornan GanzVerve Records (mais avec simplement 2 singles pour l'année 1965).

Une année 1965 marquée par la superbe collaboration avec Kenny Burrell et Grady Tate ("The Organ Grinder's Swing" et "I'll close my eyes" / Verve Records VK 10363). 

 

- Référence musicale VII (en bas d'article) -

 

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 - Pochette "Got My Mojo Workin" Jimmy Smith pour Verve Records en 1966 (Source : 75 M.N.S) -

 

 

C'est durant les années 1966 et 1967 que Jimmy Smith enregistre le plus grand nombre de morceaux pour ses deux compagnies de disques Blue Note et Verve Records.

Au tout début de l'année 1966, Jimmy Smith enregistre deux disques pour Alfred Lion, dont le EP "Bucket" (Blue Note L4235), avec "John Brown's Body" en face B.

Dès le mois de février de cette même année 1966, Jimmy Smith enregistre également "Theme from where spies are", et cette fois pour Verve Records.

L'organiste sort juste après (en mars exactement) son grand hit "Got My Mojo Workin", et au mois de juillet c'est au tour de "Hoochie Coochie Man" (VK10426) ..

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Le rythme est réellement effréné durant cette année 1966 : il arrive même à enregistrer un dernier single pour Alfred Lion ("Bucket"/"Sassy Mae" Blue note VK1927) en décembre !

L'année suivante en 1967, Jimmy Smith va tout simplement exploser son rythme d'enregistrement (!) en sortant au total, 9 singles, tous pour Verve Records.

C'est également durant cette année 1967 que Jimmy Smith fait ses meilleures ventes, ses morceaux sont classés aux meilleures places dans les charts.

Le musicien prend une véritable stature de vedette durant cette fin des années 1960, il est par exemple régulièrement invité lors de show télévisés aux États-Unis.

 

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Durant cette fin des années 1960, les oeuvres de Jimmy Smith sont omniprésentes sur les ondes radios, son nom est connu par les amateurs de musique.

L'organiste fait aussi de très belles ventes de disques sur le vieux continent, Verve Records possède un solide réseau de distribution en Europe.

Les compagnies américaines de disques avaient très vite repéré ce jeune public en Europe, très friand de Jazz et ouvert aux nouvelles sonorités venues d'Outre Atlantique.

Désormais, la renommée de Jimmy Smith est telle que sa musique est même choisie pour figurer dans des oeuvres cinématographiques.

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En 1964, son morceau "The Sermon" est choisi par le réalisateur Sidney Miller pour son film "Get Yourself a College Girl", avec entre autres Nancy Sinatra.

Pourtant, à partir des années 1968 et 1969, Jimmy Smith va énormément ralentir le nombre de ses enregistrements pour Blue Note et Verve Records.

L'année 1969 et même une "année blanche" pour le musicien !... Mais cette absence ne cache pas une maladie, ou un problème quelconque... Bien heureusement !

En fait, Jimmy Smith s'épanouit parfaitement auprès de sa magnifique épouse Lola, de plus il profite de ses nombreux enfants.

Jimmy Smith va avoir quatre enfants dont son jeune fils Jimmy Junior, et trois filles (toutes nées à Philadelphie) Jia, Anita et Janet.  

 

 

 - Référence musicale VIII (en bas d'article) -

 

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  - Pochette Jimmy Smith en 1967 pour Verve Records (Source : 75 M.N.S) - 

 

 

De plus, comme je l'avais souligné auparavant, Jimmy Smith est clairement un épicurien, un homme qui sait apprécier les bonnes choses...

Pas étonnant, donc, que cet artiste d'exception fasse une pose justement au meilleur moment de sa carrière... un véritable épicurien !...

De plus, c'est durant l'année 1969 (celle de son absence des studios d'enregistrements) qu'il décide de mettre sur pied un projet qui lui tient particulièrement à coeur.

Effectivement, Jimmy Smith a depuis quelques années un projet bien précis : il veut devenir propriétaire et ouvrir son propre club musical.

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Le musicien ne veut plus dépendre de certains producteurs véreux, une décision prise après avoir rencontré quelques difficultés pour obtenir des cachets de concerts.

C'est donc au tout début des années 1970, que Jimmy Smith réussit enfin à réaliser son projet en ouvrant un tout nouveau club musical.

Dès le début de sa carrière, l'organiste a habilement tissé un important réseau, un "carnet d'adresses", de producteurs et d'hommes d'affaires.

Des décideurs, mis en confiance par le grand charisme du musicien, qui vont l'aider à mettre sur pied cette nouvelle aventure dans le domaine économique.

 

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C'est donc exactement au 12910 Victory Boulevard, à North Hollywood (lieu situé en périphérie de Los Angeles dans l'état de Californie aux États-Unis )

que Jimmy Smith inaugure, et ouvre, son club  "The Jimmy Smith Jazz Supper Club" comme tout nouveau propriétaire.

Son club va lui permettre de faire jouer de nombreux artistes musiciens, comme son ami Wes Montgomery, tout en gardant le contact avec son orgue chéri.

Entre 1969 et la fin des années 1970, Jimmy Smith va tout de même continuer à enregistrer, mais épisodiquement et quelques morceaux uniquement.

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C'est une période durant laquelle il va signer des contrats pour de nouvelles compagnies de disques, même s'il est toujours sous contrat pour Blue Note Records.

Jimmy Smith intègre le catalogue de Pride Records, puis Mojo Records (avec un seul single "Bro'Pug"/"Killing Me Softly"),

avant d'être appelé pour rejoindre, en 1977, une des grandes maisons de disques de la ville de Chicago, dans l'état de l'Illinois, Mercury Records.

C'est le rythme toujours important de concerts qui vont, entre autres, pousser Jimmy Smith à faire un come back au début des années 1980.

En 1981, Jimmy Smith enregistre pour son retour un album avec le grand ténor saxophone Eddie Harris à San Francisco.

 

- Référence musicale IX (en bas d'article) -

 

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 - Affiche du New York Jazz Festival en 1967 avec (entre autres !!) Jimmy Smith (Source : JM) -

 

 

Avec ce nouveau départ dans sa carrière, Jimmy Smith va aussi changer son entourage, et sa maison de disques.

Il va donc s'associer avec le plus grand producteur Afro-Américain du moment : monsieur Quincy Jones.


Bien malheureusement, et étonnamment, cette collaboration prometteuse ne va rien donner de bon pour Jimmy Smith.

Après cet échec avec Quincy Jones, Jimmy Smith va d'ailleurs s'installer un moment à Nashville, comme pour conjurer le sort...

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Mais, malgré ses déboires, Jimmy Smith reste un véritable showman qui sait toujours enflammer les foules !

Ces années 1980/1990 sont remplies d'anecdotes sur ses incroyables prestations scéniques lors de ses concerts aux quatre coins du monde.

C'est d'ailleurs à cette époque que j'ai eu la chance de le voir en concert, tout comme beaucoup de Modernist qui ne manquaient pas ses concerts.

Jimmy Smith, accompagné par Stanley Turrettine, va faire un passage très remarqué et triomphal (en 1989) lors du Chicago Jazz Festival.

 

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En 1995, lors de son retour chez Alfred Lion et Blue Note Records (label qu'il ne va jamais réellement quitter),

Jimmy Smith va également initier une nouvelle (!!) génération de musiciens à ses ballades sautillantes pleines de Bop et de Funk.

En 2000, Jimmy Smith va enregistrer pour Universal Records "Dot Com Blues" en collaboration avec Etta James, BB King, Taj Mahal, Dr John, et Phil Upchurch (!!).

Cet enregistrement est un véritable honneur pour l'organiste, il représente en effet la musique Jazz face aux monstres sacrés du Blues et du R&B.

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Durant les années 2000, Jimmy Smith reste toujours très actif , même s'il n'est plus sur le devant de la scène (du moins pour l'instant...)

L'organiste continue ses collaborations, et ses enregistrements, en préparant aussi un show avec Joey De Francesco, président de Concord Records.


 Jimmy Smith est proche de Concord Records depuis les années 1990, il est même devenu ami avec le propriétaire du label Joey De Francesco.

C'est d'ailleurs en préparant la sortie d'un tout nouvel album pour Concord Records, que Jimmy Smith va subitement décéder.

 

 - Référence musicale X (en bas d'article) -

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- Mr Jimmy Smith en 2000 (Source : DCB) -

 

Effectivement, les deux compères venaient à peine d'enregistrer "Legacy" (l'album sortira en 2005), lorsque Jimmy Smith... meurt subitement !

Jimmy Smith est effectivement découvert mort dans son domicile, à Scottsdale, par son manager Robert Clayton le 8 février 2005.

Il semble que le musicien n'est aucunement souffert, il est mort durant son sommeil en pleine nuit ... presque paisiblement pourrait-on dire !..

Le grand organiste Jimmy Smith venait à peine de recevoir, en 2004, le prestigieux titre de "Jazz Master" par l'illustre National Endowment of Arts.

Sa disparition est une immense et terrible perte, ses funérailles vont être très largement suivies, particulièrement par la communauté Afro-Américaine. 

Un musicien lumineux et incroyable qui disparait, en laissant derrière lui une oeuvre totalement fabuleuse, une oeuvre adorée et choyée par les Modernists... 

 

   

 Alexandre Saillide-Ulysse

 

75 M.N.S ® !


 

Sources :

 

 - Gérard Montarlot "Le Jazz et ses musiciens", Editions Hachette, Paris, 1963.

- Philippe Carles, André Clergeat & Jean-Louis Comoli "Dictionnaire du Jazz", Editions Laffont, Paris, 1995.

- Joachin-Ernst Berendt "The Jazz book from Ragtime to Fusion and beyond", Editions Lawrence Hill Book, New York, 1981

- Jazz Magazine (Divers numéros) & Hot Club de France (bulletins)

 

Références musicales :

 

- Sélection I : Jimmy Smith "The Preacher" - Blue Note Records (45-1636) - 1957

- Sélection II : Jimmy Smith & Lou Donaldson"All Day Long Part 1&2" - Blue Note Records (45-1676) 1958

- Sélection III : Jimmy Smith "Mack The Knife" - Blue Note Records (45-1766) - 1960

- Sélection IV : Jimmy Smith "Walk On The Wild Side" - Verve Records (10255) - 1962

- Sélection V: Jimmy Smith "The Organ Grinder's Swing" - Verve Records (10363) - 1965

- Sélection VI : Jimmy Smith "Hobo Flats Part 1&2" - Verve Records (VK 10283) - 1963

- Sélection VII : Jimmy Smith "Got My Mojo Workin" - Verve Records (VK 10393) - 1966

- Sélection VIII : Jimmy Smith "Funky Broadway" - Verve Records (VK 10536) - 1967

- Sélection IX : Jimmy Smith "Groove Drops" - Verve Records (VK 10652) - 1968

- Sélection X : Jimmy Smith "Bro'Pugh" - Mojo Records (L8-1629) - 1974



07/01/2018
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