Le Cercle Modernist

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Little Willie John : Le Prodige.

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- Little  Willie John circa 1956 (Source : TCU) -

 

 

 

 "Ma mère m'a dit "Si tu veux t'appeler Little Willie John il faut que tu sois au moins aussi bon que Little Stevie Wonder ! " Stevie Wonder (circa 1980) -

 

 

Little Willie John est incontestablement un artiste précurseur pour la musique Rhythm'n'Blues.

La période qu'il traverse, entre les années 1950 et 1960, en fait un artiste aux caractéristiques spécifiques.

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  Little Willie John est un musicien américain fortement apprécié au sein de notre culture Modernist.

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Mais, c'est également un artiste révéré par d'autres scènes, principalement dans le milieu Fifties ...

En fait, sa musique déplace les "frontières" musicales entre les différentes périodes musicales.

 

En effet, Little Willie John peut être considéré comme un artiste proprement "crossover", musicalement parlant.

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Ses enregistrements de Early Rhythm'n'Blues, proche du pur Rock'n'Roll, sont précurseurs et annoncent la Soul Music.

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Musicalement, le tempo Blues est poussé par une puissante rythmique Rock 'n' Roll,

tout cela accompagné par l'énergique et très profonde voix de Little Willie John, une voix très Soul déjà !

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La voix et le style de chant de Little Willie John, celle d'un ténor empreint de Gospel,

représentent parfaitement cette période fondatrice pour la musique Afro-Américaine.

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Plongeons-nous maintenant plus profondément dans la passionnante histoire de la carrière "express" de Little Willie John...

 

 - Référence musicale 1 (en bas d'article) -

 

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 - Reproduction oeuvre de Michael Mullan (Source : AP) -

 

 

 Little Willie John est né sous le nom de William Edward John, le 15 novembre 1937.

Il vit d'abord dans la petite ville de Camden (et non à Cullendale comme il est souvent indiqué) dans l'état de l'Arkansas au Sud des Etats-Unis.

 William fait partie d'une famille nombreuse, il a 9 frères et soeurs : ses parents sont vite obligés de déménager et quitter l'Arkansas.

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Comme beaucoup de Noirs des Etats du Sud ils espèrent trouver une vie meilleure dans les grandes villes industrielles.

En 1942, le jeune William Edward John quitte, avec toute sa famille, sa petite ville de Camden pour rejoindre Detroit dans l'état du Michigan.

Dés qu'il s'installe à Detroit, il crée avec ses frères un groupe de Gospel qui se produit régulièrement dans les très nombreuses salles de la ville.

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 N'oublions pas que la ville de Detroit est déjà un incroyable vivier de groupes et de producteurs de musique Afro-Américaine.

Certes, ce n'est pas encore la frénésie de la période d'or déclenchée en partie par TAMLA MOTOWN,

mais, la richesse et la qualité de la scène musicale à Detroit annonce justement ces prochaines années de fastes...


Par exemple, durant cette même période "post 1955" à Detroit, un autre artiste majeur est également entrain d'exploser : Jackie Wilson.

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Jackie Wilson, natif de Detroit, a remplacé Clyde Mc Pather au sein du groupe des Dominoes, 

grâce aux compositions de Berry Gordy, futur Boss de TAMLAil va marquer l'industrie musicale.

Berry va lui composer des morceaux faits pour devenir de véritables hits comme "Reet Petite", en 1957, ou "To Be Loved" en 1958.

Berry Gordy va incontestablement écrire une des plus belles réussites, pour un Business Man Afro-Américain, au sein de l'industrie musicale.

 

 

 - Référence musicale 2 (en bas d'article) -

 

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  - Skyline District Detroit City circa 1950 (Source : RWE) -

 

 

En 1951, William Edward John participe à un "Radio crochet" pour jeunes talents organisé par Johnny Otis.

Il est tout de suite repéré directement par Johnny Otis, qui est déjà une personnalité incontournable: il joue avec son orchestre, tout en travaillant à la radio.

Johnny Otis, qui se nomme en fait Ioannatis Alexandres Veliotes

est un homme aux multiples facettes : écrivain, chanteur, producteur, Disc-Jockey, présentateur T.V., et même Pasteur !...

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C'est d'ailleurs grâce à Johnny Otis, que le jeune William rencontre Syd Nathan, manager pour la compagnie KING Records.

Mais, étonnamment, cette première rencontre avec le label KING ne va pas être payante pour William Edward John :

Syd Nathan préfère embaucher Hank Ballard au sein de son "écurie", choix judicieux car il va donner de beaux succès au label.

• 

 Malgré ce relatif échec, William Edward continue avec ferveur et application son apprentissage musical en intégrant différentes formations.

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N'oublions pas, au bout du compte, que le jeune prodige vient tout juste de fêter ses 14 ans en 1951 ... cela promet pour le futur !!...

 Entre 1951 et 1955, William Edward John va donc parfaire son éducation de musicien, en profitant des conseils,

de l'expérience, de grands maîtres incontestés du Jazz avec les orchestres de Count Basie, puis de Duke Ellington.

William Edward John effectue aussi une tournée de plusieurs concerts pour accompagner le saxophoniste ténor Paul Williams.

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Il va même faire quelques enregistrements lors de séances d'accompagnements, avant 1955, pour les labels RAMA et PRIZE :

sa carrière discographique est donc bien antérieure à 1955 à la différence de ce que beaucoup pensent encore,

même s'il ne s'agit, en fait,  que de simples "apparitions" assez courtes et discrètes, le jeune William fait son chemin ...

Un chemin qui l'amène très vite vers le début d'une nouvelle période de reconnaissance et de succès, grâce, enfin (!) à l'aide de KING Records.

 

 

 - Référence musicale 3 (en bas d'article) -

 

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 - (Source : KR) -

 

 

Après le premier échec de son approche auprès de KING Records, le jeune William Edward John ne pensait plus intéresser le label.

Il était même devenu réticent à courir les studios pour chercher des contrats auprès des compagnies en préférant se concentrer sur son Art en jouant.

Pourtant, après un nouveau "coup de pouce" de son ami musicien Johnny Otis,  il attire de nouveau l'attention en la personne d' Henry Glover.

Henry Glover est le tout nouveau producteur et Boss de KING Records, installé à New York City,

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c'est l'homme qui va donner un nouveau souffle et surtout toute son ampleur à KING Records qui va devenir un des piliers de l'industrie musicale américaine.

 King Records avait commencé dès 1943 avec Syd Nathan à sa tête, le label est d'abord spécialisé en Country Music,

avant de rapidement distribuer des disques 78 Tours de Race Music (reportez-vous à l'article, dans " Le Cercle Modernist", à propos de la Race Music).

 La force et la singularité de KING Records réside justement dans le fait de ne pas s'intéresser exclusivement à un genre musical spécifique.

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En effet, le label KING Records se veut "multi-carte", ce qui explique d'ailleurs ses nombreuses subdivisions, tout en "concentrant", d'une manière très pragmatique,

l'ensemble de ses outils : enregistrement, production et même distribution sont mis en place et fabriqués au sein de la même "maison" !

 Bref, KING Records représente parfaitement l'aventure de ses compagnies de l'industrie triomphante du disque à la fin des années 1950.

 Le jeune William Edgard John va donc profiter de cette véritable force d'impact, grâce à l'aide de Henry Glover :

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en 1955 il signe, finalement, son premier contrat pour KING Records, tout juste après son audition au studio du label à New York City.

C'est le début d'une longue aventure faite avant tout de fidélité : William Edgard John va rester toute sa carrière auprès de KING Records.

 Le jeune artiste est une des premières grandes vedettes de Rhythm'n'Blues qui rencontre un énorme succès pour le label :

dès son premier single, "All Around The World" sorti en juillet 1955 (KING - 454818), c'est un succès !

Le morceau est classé rapidement numéro 5 du R&B Chart des Etats-Unis, durant l'été de cette même année qui le voit intégrer le label de Henry Glover.

 

 

 - Référence musicale 4 (en bas d'article) -

 

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 - Plaque Commémorative de King Records à Cincinnati dans l'état de l'Ohio (Source : BF) -

 

 

 

C'est aussi à cette époque, dès la signature de son contrat, que William Edward John change de nom,

chose somme toute très courante pour les artistes de Rhythm'n' Blues à cette époque ...

Bien entendu, la petite stature de William Edward explique en partie ce surnom de "Little" Willie John.

Mais, le fait qu'il soit doté d'un fort talent à son jeune âge, rappelons qu'il n'a que 18 ans lors de sa signature pour KING Records,

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explique aussi le choix fait pour ce surnom spécifique, bien que sa mère l'ait prévenu sur certains risques "d'imitation" (voir la citation en tête d'article)...

 Little Willie John va donc enregistrer pendant 6 années pleines pour les studios d'enregistrement de KING Records.

Le jeune virtuose va graver prés d'une soixantaine de singles (!!) pour sa compagnie de prédilection,

et, ce ne sont pas moins de vingt morceaux (!!!!) qu'il va placer parmi les toutes premières places des meilleurs Charts aux Etats-Unis.

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 Ce sont, par exemple, 5 de ses morceaux qui se classent, de longues semaines au Top 5 des Charts de R&B aux Etats-Unis :

 "Need You Love so Bad" (KING /45-5539), avec "All Around The World" (gravé 3 mois auparavant, en octobre 1955),

puis "Talk To Me, Talk To Me" sorti lui en 1958 (KING - 455108), et "Take My Love (I want To Give it All To You)" de juin 1961 (King - 455516).

De plus, nous pouvons rajouter à ses succès le morceau "Fever", ce morceau va devenir un véritable standard international,

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d'ailleurs, dès sa sortie sur le marché du disque, "Fever" devient immédiatement numéro 1 durant de longues semaines dans les Charts !

 Ce morceau peut être considéré comme sa plus grande réussite commerciale, il va être repris ou même "samplé" plus récemment de nombreuses fois :

Peggy Lee dans les années 1960, plus tard le groupe The Mc Coy's durant les années 1970, jusqu'à Madonna qui reprend le morceau en 1992 !...

Little Willie John ne va pas passer plus d'un mois sans enregistrer un disque pour le label KING : c'est incontestablement le trésor du label !

 

 - Référence musicale 5 (en bas d'article) -

 

 Little Willie John - King Records Advertise 1961.jpg

 - Encart publicitaire 1961 (Source : K.R) -

 

 

Little Willie John, artiste particulièrement talentueux est une figure légendaire au sein de la culture musicale Modernist.

Sa place incontournable, et son rôle précurseur, dans le passage de témoin entre les différentes périodes musicales,

en l'occurrence du Doo Woop (ou Early R&B pour certains) aux premiers pas du Rhythm'n'Blues (ou Early Soul ...),

reste une référence musicale incontournable doublée d'un modèle authentique pour beaucoup d'entre nous.

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La puissance et le Jump de ses morceaux, comme son fantastique "I'm Shakin" (KING - 455342) sorti en avril 1960,

évoque cette frénésie et cette effervescence propre à la fraîcheur et la spontanéité propre à ce jeune prodige.

Une profonde spontanéité qui est une des caractéristiques fondamentales du Real Deal Modernist,

une démarche authentique toujours consciente et particulièrement fière de ses racines.

 

Alexandre Saillide-Ulysse. 

 

 

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- Référence musicale 6 (en bas d'article) -

 

 

 

Sources :

 

 - Sebastien Danchin "Encyclopédie du Rhythm'n'Blues et de la Soul", Editions Fayard, Paris, 2002

- Phyl Garland "Les Dieux de la Soul", Editions Buchet-Castel, Paris, 1972

- Peter Gulnarick "Sweet Soul Music", Editions Harper & Row, New York City, 1986

- Jean Louis Lamaison " Soul Music", Editions Albin Michel (Collection Rock&Folk) Paris, 1977

 

 

Références musicales :

- Sélection 1 : Little Willie John "All Around The World" - KING (4818) - 1955

- Sélection 2 : Little Willie John "Fever" - KING (4935) - 1956

- Sélection 3 : Little Willie John "Doll Face" - KING (5681) - 1962

- Sélection 4 : Little Willie John "Without A Friend" - KING (5694) - 1962

- Séléction 5 : Little Willie John " I've Got Spring Fever" - KING (5503) - 1961

- Sélection 6 : Little Willie John " I'm Shakin' " - KING (5823) - 1963



05/04/2016
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